kikaécri

Citation :

La seule concession que nous puissions encore faire aux autres est de les décevoir. De toutes façons, ils ne pourront comprendre notre désir d'échapper au surmenage du moi, de nous arrêter au seuil de la conscience et de n'y jamais pénétrer, de nous tapir au plus profond du silence primordial, dans la béatitude inarticulée, dans la douce stupeur où gisait la création, avant le fracas du verbe. Ce besoin de nous cacher, de fausser compagnie à la lumière, d'être le dernier en tout, ces emportements de modestie où, rivalisant avec les taupes, nous les accusons d'ostentation, cette nostalgie de l'inéclos et de l'innommé, — autant de modalités de liquider l'acquis de l'évolution pour retrouver, par un bond en arrière, l'instant qui précéda l'ébranlement du devenir.

c'est autre chose que Proust Marcel quand même

je comprends pas la fin.

808 a écrit:

je comprends pas la fin.

et pourtant...

bobépine a écrit:

808 a écrit:

je comprends pas la fin.

et pourtant...

... que la montagne est belle ?

808 a écrit:

je comprends pas la fin.

c'est un peu normal, j'ai tiré la phrase de son contexte. Le passage "dans la douce stupeur où gisait la création, avant le fracas du verbe" pourrait t'éclairer mais, en relisant à froid, je me rends compte que l'ensemble est difficile à saisir.

C'est un texte de Cioran intitulé "Désir et horreur de la gloire", que j'ai retrouvé dans une vieille NRF de 1963

en fait je crois avoir saisi en gros mais je me demandais dans quelle mesure les termes "évolution" et "devenir" avaient à voir avec la "création" artistique qui semble être le sujet.

mais il s'agit apparemment du devenir de l'œuvre en gestation, si je ne m'abuse.

808 a écrit:

en fait je crois avoir saisi en gros mais je me demandais dans quelle mesure les termes "évolution" et "devenir" avaient à voir avec la "création" artistique qui semble être le sujet.

mais il s'agit apparemment du devenir de l'œuvre en gestation, si je ne m'abuse.

en fait cela va plus loin, "création" renvoie à la création du monde et au jardin d'Eden, le devenir étant le devenir humain une fois consommé le fruit de la connaissance. Plus que l'oeuvre, il évoque l'accomplissement humain sous quelque forme que ce soit, du moment qu'elle implique reconnaissance, jugement d'autrui.

bref c'est le chantre ultime du c'était mieux avant.

808 a écrit:

bref c'est le chantre ultime du c'était mieux avant.

non, il ne déplore pas la perte de l'innocence mais réfléchit sur la possibilité d'une innocence retrouvée, où l'homme pourrait s'accomplir sans vanité

chip damiani a écrit:

808 a écrit:

bref c'est le chantre ultime du c'était mieux avant.

Non, il ne déplore pas la perte de l'innocence mais réfléchit sur la possibilité d'une innocence retrouvée, où l'homme pourrait s'accomplir sans vanité

Il ne s'agit même pas de retrouver une innocence qui n'est qu'une modalité de l'être mais de s'anéantir dans une sorte de vide d'avant le Verbe ("au commencement était le Verbe"), un sorte de nirvana ou le moi se dissolverait.
Cioran est un grand lecteur de Shopenhauer qui fut lui mêrme influencé par la pensée boudhique.

P/Z a écrit:

chip damiani a écrit:

808 a écrit:

bref c'est le chantre ultime du c'était mieux avant.

Non, il ne déplore pas la perte de l'innocence mais réfléchit sur la possibilité d'une innocence retrouvée, où l'homme pourrait s'accomplir sans vanité

Il ne s'agit même pas de retrouver une innocence qui n'est qu'une modalité de l'être mais de s'anéantir dans une sorte de vide d'avant le Verbe ("au commencement était le Verbe"), un sorte de nirvana ou le moi se dissolverait.
Cioran est un grand lecteur de Shopenhauer qui fut lui mêrme influencé par la pensée boudhique.

en fait je faisais allusion à la fin du texte, que je n'ai pas cité ici, où il évoque cet état contradictoire ("nous ne pouvons vivre avec le sentiment d'une faute totale, ni avec ce cachet d'infâmie sur chacune de nos entreprises.")

chip damiani a écrit:

P/Z a écrit:

chip damiani a écrit:

808 a écrit:

bref c'est le chantre ultime du c'était mieux avant.

Non, il ne déplore pas la perte de l'innocence mais réfléchit sur la possibilité d'une innocence retrouvée, où l'homme pourrait s'accomplir sans vanité

Il ne s'agit même pas de retrouver une innocence qui n'est qu'une modalité de l'être mais de s'anéantir dans une sorte de vide d'avant le Verbe ("au commencement était le Verbe"), un sorte de nirvana ou le moi se dissolverait.
Cioran est un grand lecteur de Shopenhauer qui fut lui mêrme influencé par la pensée boudhique.

en fait je faisais allusion à la fin du texte, que je n'ai pas cité ici, où il évoque cet état contradictoire ("nous ne pouvons vivre avec le sentiment d'une faute totale, ni avec ce cachet d'infâmie sur chacune de nos entreprises.")

J'ai beaucoup aimé ça (Cioran) mais je me demande si je n'en suis pas un peu revenu. Il y a tout un coté "adolescent" assez faiblard tout de même.
Son petit bouquin sur la France paru cette année est vraiment bon.

chip damiani a écrit:

Citation :

La seule concession que nous puissions encore faire aux autres est de les décevoir. De toutes façons, ils ne pourront comprendre notre désir d'échapper au surmenage du moi, de nous arrêter au seuil de la conscience et de n'y jamais pénétrer, de nous tapir au plus profond du silence primordial, dans la béatitude inarticulée, dans la douce stupeur où gisait la création, avant le fracas du verbe. Ce besoin de nous cacher, de fausser compagnie à la lumière, d'être le dernier en tout, ces emportements de modestie où, rivalisant avec les taupes, nous les accusons d'ostentation, cette nostalgie de l'inéclos et de l'innommé, — autant de modalités de liquider l'acquis de l'évolution pour retrouver, par un bond en arrière, l'instant qui précéda l'ébranlement du devenir.

c'est autre chose que Proust Marcel quand même

Ceci dit, ça reste quand même très empreint de métaphysique mais le roumain n'est pas à une contradiction près.
A ce sujet une petite méditation personnelle.

http://ruinescirculaires.free.fr/index.php?2005/11/29/134-evadons-nous